La transition écologique coïncide-t-elle avec la protection du patrimoine ? – JAM

La transition écologique coïncide-t-elle avec la protection du patrimoine ?

Le glacier d'Aletsch fait partie du patrimoine helvétique, comme ici à Vevey représenté lors du Festival Vevey Images. (KEYSTONE/Laurent Gillieron)

Les Verts alertent sur le danger de disparition des glaciers helvétiques,  l’un des principaux atouts du patrimoine national. L’UDC également, tout en s’opposant à un très grand nombre d’actions climatiques, par peur d’altérer les paysages helvétiques.

Si l’on suit les dernières statistiques de l’OFS, la Suisse devrait se retrouver orpheline de ses glaciers à l’horizon 2070. Au-delà de la fonte de ces géants blancs, ancrage certes important dans l’identité alpine, le changement climatique incombe un enjeu bien plus grand que la seule perte de valeur paysagère.
Cet article s’inscrit dans un thématique questionne l’interaction entre patrimoine suisse et climat. Une illustration originale des effets du changement climatique sur différentes facettes de la société.
Le recul des glaciers suisses, perceptible jusqu’aux yeux de la gardienne de la cabane de Valsorey (VS), met en péril l’identité suisse. Un géographe à l’Université de Genève éclaire cette connexion profonde entre la montagne et l’imaginaire national, aujourd’hui menacée par le changement climatique. 
L’identité alpine à l’épreuve du climat

Le fromage, produit du terroir phare de l’identité helvétique, risque de perdre de son goût unique dû aux modifications de la flore alpine et au manque d’eau, conséquence de la hausse du thermomètre. 
Quand le climat réécrit la recette du fromage

Le tourisme hivernal, inventé à St-Moritz en 1864, contribue également de manière emblématique au slogan «Made in Switzerland», dont la faîtière tente de sortir de cette image blanche de la Suisse au vu du manque d’enneigement constant de ces dernières années. 
Vendre de la poudreuse aux touristes, un tradition suisse sur le déclin ?

Avec le réchauffement climatique, le patrimoine helvétique – naturel, immatériel ou culturel – est en danger et les glaciers perdent chaque année un peu plus de terrain. Au Parlement, les avis divergent quant aux différentes solutions à adopter. Certaines des actions climatiques impliquent un changement de nos paysages nationaux, comme des panneaux solaires à la montagne ou un parc éolien sur nos collines.

Un patrimoine qui s’adapte

Pour l’UDC, le solaire et l’éolienne ne doit en aucun cas entacher nos paysages. Mais alors comment ce parti, si attaché au patrimoine helvétique, compte-t-il protéger ce même patrimoine naturel ? L’identité suisse et ses alpages, ses montagnes et ses glaciers sont au centre des préoccupations de la droite populiste. Le Conseiller national UDC Thomas Stettler explique que «le patrimoine naturel de la Suisse va se métamorphoser au fil des années en raison du réchauffement climatique. Certaines espèces vont certes disparaître, mais d’autres vont apparaître, même si la disparition des glaciers pourrait avoir un impact sur l’image du pays et son attractivité». 

Le député UDC nous explique que «la culture suisse va s’adapter à l’évolution sociétale, mais ce n’est pas le rôle des acteurs politiques de définir le cadre de cette culture». Avant d’ajouter que le paysage a une influence sur le sentiment d’appartenance des Suisses, mais que celui-ci varie en fonction de la génération et du lieu de résidence. Thomas Stettler n’est pas inquiet pour l’avenir du patrimoine helvétique même s’il craint une perte de l’esprit de collaboration nationale particulièrement à cause des nouvelles générations, selon lui, toujours plus individualistes.

 «Un levier pour le climat»

Du côté des écologistes, le Vert Fabien Fivaz est quant à lui conscient d’une tension entre la nécessité de développer les énergies renouvelables et la protection du patrimoine naturel. Les critiques fusant sur le plan éolien de Neuchâtel, ou sur le projet de rénovation de La Chaux-de-Fonds en sont le parfait exemple. Pour le Neuchâtelois, «la conception du patrimoine de la droite populiste est plus folklorique que patrimoniale, alors que chez les Verts, on le perçoit plus comme un élément essentiel, permettant de faire levier dans la lutte contre l’inaction climatique».

Le Vert genevois Nicolas Walder insiste lui aussi sur l’importance de ne pas figer le patrimoine : «qu’il soit naturel ou bâti, il doit être envisagé de manière évolutive et dynamique face aux changements sociétaux.» Pour lui, il est nécessaire d’intégrer les énergies renouvelables au paysage. D’autant plus que les changements causés par le réchauffement climatique ne seront bientôt plus seulement visuels, ils toucheront aussi les habitudes de la population suisse.

Une idée se retrouve dans les arguments des deux bords politiques. Celle d’un patrimoine qui évolue avec son temps, en perpétuel mouvement. Il reste tout de même des divergences quant aux manières de concilier la protection du climat avec l’action climatique. La droite privilégie une approche économique en utilisant la protection du patrimoine pour faire face aux différentes mesures proposées par les écologistes. De leur côté, les Verts souhaiteraient rapidement voir un consensus national sur la sortie des énergies fossiles pour pouvoir aller de l’avant.

Ce travail journalistique a été réalisé pour le cours « Atelier presse II », dans le cadre du master en journalisme de l’Académie du journalisme et des médias (AJM) de l’Université de Neuchâtel.

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