Avec la démocratisation et le perfectionnement des systèmes de stockage et de partage d’informations comme la blockchain, il est désormais possible de suivre un produit dans toute sa phase de création et d’acheminement. Les entreprises agroalimentaires s’en servent notamment pour optimiser leurs chaines d’approvisionnement, traçant à la seconde leurs denrées à chaque étape de leur voyage. Cette nouvelle application de la blockchain peut-elle également servir aux consommateurs soucieux de la provenance de leurs produits ?
De la terre à l’assiette
Avant toute chose, reprenons les bases. Le secteur agroalimentaire brasse chaque année des millions de tonnes de denrées, alimentaires. À cette échelle, plus question de demander aux employés de quel producteur viennent vos fruits. La plupart du temps, un petit panneau coincé entre deux kiwis précise « Espagne », « France » ou encore « Turquie », mais ça s’arrête là.
Pourtant, l’origine d’un fruit, par exemple, est bien plus complexe que cela. Entre le pays où il a effectivement poussé et celui où il est vendu, il y a tout un fantastique voyage à base de bateaux, de camions ou encore d’avions. Et parfois des allers-retours entre plusieurs pays en fonction du produit concerné. Mais d’une manière générale, le fait d’assurer la traçabilité d’un produit permet non seulement d’en savoir plus sur son origine mais également d’être plus réactif en cas de problème avec de la marchandise distribuée. Si un ou plusieurs produits venaient à être impropres à la consommation, ils sont alors plus aisément identifiables et leur retrait du circuit est facilité.
Lorsqu’on parle de traçabilité alimentaire, ou agroalimentaire dans le cas présent, on doit donc considérer cette multitude de « petites » étapes entre le producteur et les consommateurs mais également tous les autres aspects organisationnels ou sanitaires de la chaîne d’approvisionnement. Toutefois, les informations issues de chaque étape sont si nombreuses et si pointues, que ce sont généralement des machines et des capteurs préprogrammés qui transmettent automatiquement les données brutes au système de traçabilité.
Schématiquement, on peut utiliser les différentes étapes de la chaîne logistique présente lors de la création d’un produit pour représenter les différentes informations et actions qui peuvent être obtenues ou réalisées grâce à une traçabilité alimentaire efficace.
Seulement, il est impossible de faire tenir tout l’historique du voyage d’un produit sur une étiquette, et c’est pourquoi, bien souvent, nous ne retrouvons que quelques lignes au dos de notre barquette de viande, nous annonçant sobrement qu’elle vient de Bulgarie, mais quelle a été transformée en Suisse. Heureusement, pour gérer ces quantités astronomiques d’informations, mais aussi pour en empêcher la falsification et en garantir un accès libre, il existe la blockchain.
Une toile d’informations
La blockchain. Voilà un mot qu’on croise de plus en plus souvent, et pourtant peu de monde pourrait expliquer concrètement de quoi il s’agit. Pour la plupart des gens, il s’agit du système qui soutient les cryptomonnaies, rien de plus.
Pourtant, l’intérêt principal de la blockchain n’est pas forcément les cryptomonnaies, mais réside dans le fait qu’elle est quasiment inviolable. Schématiquement, on peut considérer la blockchain comme un réseau décentralisé, donc sans administrateur central, constitué de blocs d’information. De plus, chaque membre est au courant des modifications apportées par les autres, ce qui prévient les tentatives de falsification.
Vu la nature des données présentes dans la blockchain, les autres acteurs vont détecter cette action et vont réagir.
Des blocs, des données, une toile… et les consommateurs dans tout ça?
Depuis 2018, le géant de l’agroalimentaire français Carrefour propose même une application accessible via le scan d’un QR code. Ainsi, les clients peuvent accéder en un instant à toute les informations sur le parcours des aliments qu’ils achètent. De l’élevage à l’alimentation, en passant par les conditions d’abatage, tout y est répertorié. Tout d’abord limitée à quelques denrées, cette application a depuis été étoffée et de nombreux produits sont traçables directement depuis un smartphone.
Besoin de garantie?
Bien entendu, les données présentes dans la blockchain sont celles que l’on a bien voulu y mettre. Pourtant, à l’heure actuelle, ce sont surtout des machines et des capteurs préprogrammés qui gèrent le partage des informations sur les systèmes de blockchain. En outre, les données partagées sont régies par tous les acteurs de la chaîne logistique sont régies par la General Food Law établie en 2002 par la Communauté économique européenne (CEE) et sont donc contrôlées.
Et question sécurité, les systèmes de blockchain sont réputés quasiment inviolables, comme l’explique Valerio Schiavoni.
Un avenir prometteur
La blockchain a donc encore de beaux jours devant elle, et le secteur agricole semble tendre vers une adoption de plus en plus large de cette technologie. En témoigne la démarche conjointement initiée en 2019 par Agroscope et l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG) en faveur de l’utilisation de cette technologie dans l’agriculture.
Par Grégoire Egger
Ce travail journalistique a été réalisé dans le cadre du Master en journalisme et communication (MAJ)
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