Depuis la fusion en 2017, Servette Chênois rafle les trophées. Déjà championnes de Suisse en 2021, les joueuses visent un doublé inédit après avoir remporté leur première Coupe en avril. Voici quatre pistes d’explications de cet irrésistible succès.
Sous l’emblématique maillot grenat, une équipe de joueuses talentueuses et bien décidées à en découdre. Si le Servette FC masculin n’est pas en reste, les Genevoises enchaînent les victoires en championnat et commencent à faire de l’ombre à leurs camarades. Depuis la fusion avec le CS Chênois, elles affichent leurs ambitions européennes, tout en se distinguant dans le paysage footballistique national. Une réussite et une envie de grandeur peu anodines qui s’expliquent par quatre facteurs.
1. Une fusion providentielle
Jusqu’en 2017, le FC Servette se reposait sur un contingent masculin. Plutôt que de créer une équipe féminine, les Grenat ont jeté leur dévolu sur le CS Chênois, club qui peinait à se développer dans sa catégorie. Une fusion bienvenue qui propulse la trésorerie de l’ancienne équipe régionale à plus de 1,5 million de francs. «L’un des plus grands budgets de Suisse», selon Loïc Luscher, responsable communication du Servette Chênois et membre du Comité.
Une intégration synonyme de tremplin pour les joueuses, qui profitent désormais de structures plus adaptées. À titre d’exemple, Sandy Maendly, mentionne le fait de pouvoir compter sur un comptable attitré. «Tous les clubs européens ne peuvent pas se permettre d’avoir un staff aussi développé que le nôtre, poursuit l’ancienne joueuse du club devenue coordinatrice sportive depuis octobre 2022. Lorsque je jouais en Italie, le dirigeant et le directeur sportif s’occupaient eux-mêmes de réserver les terrains et de verser notre paie.»
2. Un entraîneur visionnaire et fidèle au poste
C’est une histoire d’amour vieille de six ans. En poste depuis la fusion, l’entraîneur du Servette Chênois Eric Sévérac est parti «d’une page blanche» pour donner force et vigueur à une équipe qui fait aujourd’hui pâlir ses adversaires.
Le technicien a participé à la professionnalisation des activités du club, créant ainsi les bases nécessaires à tout succès sportif. «Ceci m’a donné des arguments solides pour convaincre plusieurs anciennes joueuses parties à l’étranger de revenir, telles que Sandy Maendly et Valérie Gillioz».
Fort d’un contingent doué, l’homme a conduit le onze genevois vers les succès qu’on lui connaît tels que la montée en LNA, la participation à la Ligue des Champions et le titre de champion national acquis en 2021.
3. Engager les perles de la scène internationale
La vision développée par Eric Sévérac et son staff a ainsi attiré à Genève plusieurs joueuses internationales, à l’image de la Française Daïna Bourma, qui a quitté les Rangers de Glasgow, en Écosse, pour rejoindre le Servette Chênois. «J’ai compris que l’équipe masculine n’était pas le seul bastion du club, et que les filles avaient leur place. Certes, du point de vue de la compétitivité du football féminin, la Suisse a encore du retard, mais le Servette Chênois agit pour avancer.»
D’ailleurs, le club n’hésite pas à sortir le porte-monnaie afin d’attirer les talents des championnats étrangers. La gardienne titulaire de l’équipe du Portugal, Inês Pereira, est l’un des profils que le club n’aurait pu recruter il y a encore quelques années.
À l’image de ses coéquipières lusophones Ágata Filipa et Mónica Mendes, la signature du dernier rempart a été pensée pour combler le départ de Gaëlle Thalmann, la gardienne de la Nati, vers l’Espagne.
«Nous engageons prioritairement des joueuses qui se connaissaient déjà. Nous ne voulons pas risquer de briser la bonne cohésion que nous avons réussi à construire», explique Eric Sévérac. Une politique de recrutement à l’étranger ciblée qui a permis au club de placer la Genève internationale sur les terrains les plus prestigieux.
4. Une académie prometteuse pour développer des talents romands
Sandy Maendly l’affirme: Servette Chênois «s’est fait à l’envers». Il est vrai que sa construction n’a rien de conventionnel. Afin d’atteindre le haut du championnat suisse, la direction a prioritairement développé sa première équipe.
Des investissements conséquents qui ont porté leurs fruits et créé un appel d’air pour les jeunes générations. Après avoir imposé son jeu en Super League, le club a multiplié à vitesse grand V le développement de ses sections juniors.
Une politique qui s’avère aujourd’hui payante. L’équipe actuelle compte quatre joueuses issues de son vivier junior: la milieu de terrain Laura Tufo (2001), la défenseuse Laura Aros (2005) et les deux défenseuses Kattalin Stahl (2001) et Laura Felber (2001). Ces deux dernières pourraient même prochainement faire leurs débuts en équipe de Suisse.
Photo: Keystone
Estelle Liechti, Franciso Carvalho da Costa, Geoffroy Brändlin
Ce travail journalistique a été réalisé pour le cours « Datajournalisme et méthodes quantitatives pour le journalisme » dans le cadre du master en journalisme de l’Académie du journalisme et des médias (AJM) de l’Université de Neuchâtel. Une version de cet article a été publiée sur Blick.ch le 12 mai.