«L’Euro en Suisse va créer du lien social» – JAM

«L’Euro en Suisse va créer du lien social»

Sandrine Mauron espère intégrer l’équipe nationale pour l’Euro, mais «à haut niveau, rien n’est jamais acquis» (crédits: Anthony Anex/Keystone).

Sandrine Mauron lutte pour se faire une place au soleil avec l’équipe de Suisse et à l’Euro 2025. Compétition dont elle est l’ambassadrice à Genève.

Le compte à rebours est lancé pour l’équipe de Suisse de football féminin qui a disputé un match de prestige vendredi soir contre l’équipe de France. Une lourde défaite en Ligue des nations (4-0), avec forcément, l’Euro 2025 dans toutes les têtes. Celle de Sandrine Mauron y compris. Le match d’ouverture – le 2 juillet à Bâle contre la Norvège – approche à grands pas.

La Vaudoise de 28 ans retrouve cette Nati au meilleur moment. La milieu de terrain – qui a quitté Servette Chênois après trois saisons de bons et loyaux services – est en ballottage pour participer à ce championnat d’Europe à domicile. Compétition continentale dont elle sera l’ambassadrice à Genève, quoi qu’il arrive. Un été palpitant s’annonce.

Vous venez d’être rappelée en sélection. Quelle a été votre réaction ?

J’y croyais, sans trop espérer non plus, pour éviter une éventuelle déception. Au final, c’est une belle surprise, et j’y vois une belle récompense pour ma saison.

C’est une grande satisfaction d’être là pour ce rassemblement, même si cela ne garantit pas encore une place définitive à l’Euro. Je me réjouis beaucoup de disputer ces deux matches, contre la France et la Norvège.

Cet été, l’Euro 2025 se déroule en Suisse, votre pays. Dans quel état d’esprit êtes-vous à l’approche de l’évènement ?

À vrai dire, je me sens bien. Je suis en forme et j’ai réalisé de bonnes performances avec mon club, Servette, où j’ai occupé un rôle important. Mais dans le sport de haut niveau, rien n’est jamais acquis.

Ma place en équipe nationale n’est pas assurée. La concurrence est forte et tout peut changer. Le 9 juin, la sélectionneuse annoncera une première liste de 30 joueuses pour la préparation, puis le 23 juin, elle communiquera la sélection finale des 23 qui participeront à l’Euro.

L’attente est pénible à vivre ?

J’ai déjà connu ce genre de situation: deux Euros (ndlr: 2017 et 2022), un Mondial (2023). L’incertitude avant les sélections, c’est presque devenu une routine. Le processus reste toujours le même: on démarre avec un groupe élargi, puis la liste se resserre. En général, j’ai joué un rôle de joker: pas titulaire, mais souvent appelée à entrer en jeu. Quoi qu’il en soit, l’Euro reste un objectif, et j’espère vraiment intégrer l’équipe. Je n’y pense pas trop, mais bien sûr, je serais déçue si je ne suis pas retenue.

Que vous soyez sélectionnée ou non, vous êtes ambassadrice de l’Euro à Genève.

Mon objectif est clair: l’Euro doit créer du lien. Ce ne sera pas qu’une simple compétition, mais un véritable moment de rencontre. Une fête à l’échelle nationale, ouverte à toutes et tous, que l’on soit une personne passionnée de foot ou pas. Même sans billet, chacun pourra profiter des fan zones, des animations et des événements autour du football. D’autant qu’avec le public plus féminin, l’ambiance est particulièrement joyeuse et fair-play.

Quel sera votre rôle ?

J’espère aussi contribuer à susciter l’enthousiasme des filles pour le football. Avec l’Association suisse de football et le programme «Héritage», l’accent est mis sur les clubs amateurs, la relève et les clubs juniors. Même si les premières divisions disposent déjà d’une bonne base, beaucoup reste à faire, notamment en deuxième division et chez les juniors.

Servette Chênois a annoncé votre départ, après trois saisons. Qu’est-ce qui a motivé cette décision ? 

J’ai reçu une opportunité unique, qui ne se refuse pas. Pour l’instant, je ne peux pas révéler le nom du club, pour des raisons contractuelles. Tout ce que je peux dire, c’est que ce sera à l’étranger. Partir, c’est sortir de ma zone de confort, mais ça me donne le sourire.

Ce départ, ce n’est pas une décision contre Servette Chênois, au contraire! Je suis très reconnaissante, c’est un club dans lequel je me suis toujours sentie très bien. Je ne pense pas que ce soit un hasard si nous avons gagné plusieurs titres – peut-être pas cette année –, mais les précédentes en tout cas.

Travaillez à côté du football, c’est une nécessité ? 

Absolument. Si je n’ai pas deux emplois, je ne finis pas le mois. Et encore, à Genève, les salaires sont plutôt «bons» comparé à d’autres clubs. Jusqu’à il y a peu, je travaillais dans la vente. Puis, j’ai été engagée pour devenir ambassadrice de l’Euro. C’est une chance exceptionnelle et surtout une expérience de vie, mais ce n’est pas ce qui me permettra de mettre de l’argent de côté.

Vous avez connu les réalités du football féminin aussi bien en Allemagne qu’en Suisse. Quelles sont, selon vous, les grandes différences entre ces deux pays ?

La Suisse accuse un certain retard par rapport à l’Allemagne. Là-bas, les droits télé sont arrivés plus tôt, le championnat est rapidement devenu professionnel et les infrastructures sont plus stables. Mon passage à l’Eintracht Francfort a été une super expérience.

L’équipe féminine portait le même maillot que les hommes, sans aucun préjugé. On jouait devant 4000 spectateurs chaque week-end, toujours à guichets fermés. L’ambiance était incroyable, ce sont vraiment des souvenirs géniaux.

On en est loin en Suisse ?

En Suisse, la mentalité est différente: les gens ont plutôt tendance à rester chez eux. Mais, une cinquantaine de passionnés assistent à tous les matches à domicile. Ces personnes, le football féminin ne peut que les remercier! J’espère que l’Euro servira de tremplin.

Par Léa Allié, Cléa Robert et Basile Mermoud
Ce travail journalistique a été réalisé pour le cours "Pratiques journalistiques thématiques" dans le cadre du master en journalisme de l'Académie du journalisme et des médias (AJM) de l'Université de Neuchâtel.

Une version de cet article a été publié dans la Tribune de Genève le 30 mai 2025.

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