Depuis son arrivée au pouvoir en 2010, le premier ministre hongrois Viktor Orban a pris des mesures restreignant la liberté de la presse. Des agissements qui ne sont pas restés sans réaction, notamment du côté de l’Union européenne.
Des médias critiques envers le gouvernement hongrois fermés ou vendus à des oligarques proches de Viktor Orban; des journalistes bannis du Parlement; ou encore ce chiffre: 90% (!) des médias du pays directement ou indirectement contrôlés en 2018 par le Fidesz, parti du premier ministre.
Voilà la situation de la presse en Hongrie depuis l’arrivée au pouvoir en 2010 du premier ministre d’extrême-droite Viktor Orban.
Résultat: depuis cette date, la Hongrie ne cesse de dégringoler dans le classement mondial de la liberté de la presse, établi par Reporters sans frontières : 23e il y a huit ans, 71e aujourd’hui…
Des contestations dès les débuts
En 2011, les députés européens (Commission européenne) font pression pour que Viktor Orban et son gouvernement modifient plusieurs points de leur loi sur les médias, créée l’année précédente. Celle-ci est jugée liberticide et contraire à la Charte européenne des droits fondamentaux, pour plusieurs raisons:
- L’instauration d’une nouvelle autorité des médias entièrement composée de membres ou proches du parti au pouvoir. Cette autorité doit sanctionner les organes de presse qui diffusent des informations “non nuancées”.
- L’obligation pour les journalistes de révéler leurs sources dans des affaires liées à la sécurité nationale.
- L’obligation pour les médias de “fournir une information équilibrée”, sous peine d’amende.
- L’obligation pour tous les médias de s’enregistrer auprès d’une autorité nationale , y compris pour les médias sur Internet.
La Hongrie a finalement cédé à la pression en acceptant de modifier certains aspects de cette loi contestée:
- L’article qui prévoyait des amendes en cas d'”outrage” à l’encontre d’individus, de minorités, mais aussi de majorités, est supprimé. Dès lors, seules seront sanctionnées l’incitation à la haine et la discrimination.
- La Hongrie s’engage à faire appliquer de manière “proportionnée” une exigence faite aux médias de “couverture équilibrée”, dans le but d’empêcher des sanctions excessives de la part du gouvernement.
Un contrôle accru
Malgré ces retours en arrière du gouvernement hongrois en 2011, celui-ci va accroître son contrôle sur le monde médiatique.
Dès 2015, la Commission européenne s’inquiète de plusieurs modifications de la loi sur la presse et la loi sur les médias:
- Le jugement des autorités hongroises concernant des “contenus médiatiques illégaux”.
- La question des sources journalistiques.
- Les sanctions imposées aux entreprises médiatiques.
- La restriction du “droit d’accès aux informations publiques”.
Encore une fois, Bruxelles réagit: le 12 septembre 2018, les députés européens votent le déclenchement d’une procédure de sanctions à l’égard de la Hongrie, avec en toile de fond le non respect des règles de l’état de droit.
Le Parlement européen invoque l’article 2 du Traité sur l’Union Européenne: un manque de respect de Viktor Orban et son gouvernement de la dignité humaine, de la liberté, de la démocratie, de l’égalité et de l’État de droit.
Le Parlement européen a ici estimé l’existence d’un “risque clair de violation grave” des valeurs fondatrices de l’Union européenne en Hongrie.
Des menaces sans conséquences
Le vote du Parlement européen pour des sanctions contre la Hongrie ne semble pas faire peur à Viktor Orban et son gouvernement.
Deux mois seulement après la décision de Bruxelles, soit en novembre 2018, une fondation liée au Premier ministre hongrois, prend le contrôle de 400 médias en Hongrie.
La version officielle: les propriétaires de ces différents médias (grands et petits journaux, radios, sites d’information) “offrent” leurs entreprises à cette fondation, nommée “Donner”. Un organisme contrôlé par deux avocats très proches de… Viktor Orban.
Une conférence sur le sujet à Perugia
La situation des médias en Hongrie a fait l’objet d’une conférence le 4 avril au Festival international du journalisme à Perugia. Le chercheur Marius Dragomir, directeur du centre de recherche médias, données et société de Budapest a notamment expliqué les stratégies plus sournoises du régime pour exercer son contrôle sur les journalistes. Des propos sur lesquels nous sommes revenus lors d’une interview audio.