ÉDITORIAL Sur l’écran de mon téléphone, les reels défilent sans arrêt. Un puits sans fond du matin au soir. Jusqu’à ce que tout s’éteigne et qu’il faille recharger la batterie. Moi y compris. Des boucles qui repartent, à l’infini.
Mais nous, jusqu’à quand pourrons-nous recharger nos batteries ? Trouver des moments où, malgré le temps qui passe, nous pourrons faire semblant qu’il s’arrête ? Un temps de la pause.
Depuis hier, notre rubrique Cy-click décrypte les boucles temporelles qui donnent au monde des airs de répétition générale. Le temps d’une pause, certain·es misent sur la pleine conscience, d’autres, plus jeunes, s’orientent vers la foi pour trouver le chemin de la béatitude.
Mais le temps de la pause peut être plus grave. Prendre le temps du constat que le capitalisme impose toujours son rythme. Prendre le temps de la sidération face à un monde qui glisse entre les mains de l’humanité.
Prendre une pause, pour repenser à la conférence donnée cette semaine par Salomé Saqué à Genève. À l’endroit où, quelques jours plus tôt, des étudiant·es ont mis en pause leurs révisions pour organiser une occupation et dénoncer le génocide en cours à Gaza.
Parmi les enchaînements éloquents de la journaliste, un mot a résonné : l’indignation. Une invitation à la pause pour ressentir la colère. Face au morcèlement des droits sociaux. Face à la famine programmée à Gaza. Face à l’injustice que notre époque normalise toujours plus.
L’indignation est un luxe qu’on ne peut plus différer. Une pause s’impose.
Alors, détachons-nous de nos téléphones et fuyons leurs gouffres temporels. Tordons le cou aux algorithmes de répétition. Prenons une pause qui ne soit pas un renoncement, mais une insoumission. Résister, c’est s’arrêter pour mieux voir, mieux comprendre et, surtout, mieux répondre.
Devant un monde qui reproduit inlassablement les mêmes schémas, faisons du présent un point de bascule. Respirer. Prier. Occuper. Et résister. Faisons une pause, refusons la boucle imposée et, ensemble, reprenons le fil.