Absentéisme au travail: un lent retour à la normale

Source: AP Photo/Itsuo Inouye

Près de quatre ans après le début de la pandémie de Covid-19, le taux d’absentéisme au travail n’a toujours pas retrouvé son niveau habituel et reste 30% plus élevé qu’en 2019. Tour d’horizon de la situation.

Entre 2009 et 2019, le taux d’absentéisme au travail se démarquait par sa stabilité, oscillant autour de 4% chez les hommes et 5% chez les femmes. Mais 2020 a marqué un tournant spectaculaire. Suite au confinement, le taux global d’absentéisme (ne comprenant pas le travail à distance) a grimpé en flèche, atteignant un pic historique de 11.1%. Malgré la levée progressive des restrictions, il peine à retrouver son niveau d’avant-crise. En 2022, soit un an après la fin des mesures les plus strictes, les chiffres demeurent significatifs: une augmentation de plus de 30% par rapport à 2019, avec 32,5% pour les hommes et 34,6% pour les femmes.

Or, tous les secteurs ne sont pas égaux face au Covid, dont les effets se font encore ressentir. Alors que l’agriculture n’a pas vu son taux d’absentéisme augmenter significativement, la plupart des domaines d’activité ont connu une augmentation d’une vingtaine de pourcents. Cette tendance est particulièrement marquée dans les domaines du service à la personne, qui continuent de subir les conséquences du confinement. Plus spécifiquement, les statistiques indiquent que les secteurs de l'hôtellerie-restauration (avec une augmentation de 35,7% de son taux d’absentéisme), du commerce (37,7%) et des loisirs (45,3%) ont été disproportionnellement impactés.

Une question de hiérarchie

Les taux d'absence pour des raisons de santé semblent être corrélés au niveau hiérarchique des professions. Entre 2019 et 2022, la plupart des professions ont enregistré une augmentation de ces taux, ce qui reflète l'impact probable de la pandémie. À la fois les cadres supérieurs et les professions intellectuelles ont vu leurs taux d'absence augmenter, de même que les groupes professionnels occupant des positions hiérarchiques plus basses. Néanmoins, quelques professions, notamment les professions élémentaires, ont présenté une baisse de leurs taux d'absence pendant cette période.

70% d'arrêts de travail

En 2022, les absences au travail en Suisse ont été principalement dues à la maladie ou à des accidents (69%). Ces chiffres soulignent l'impact majeur des problèmes de santé sur les absences, avec notamment la nécessité de faire de la prévention sur le lieu de travail. Les raisons diverses d'absence témoignent de la complexité des situations individuelles pouvant influencer la présence au travail, mettant en avant la nécessité d'une approche souple des politiques en matière d'absentéisme pour soutenir les travailleurs, notamment pour des absences dues au congé maternité et au service militaire/civil.

Pas de rupture générationnelle

Les chiffres indiquent des taux d'absence similaires à travers les différentes tranches d'âge en Suisse. Les écarts entre les groupes (de 15 à 64 ans) sont minimes, tous se situant autour de 4%. L'année 2022 étant encore largement marquée par des absences liées au Covid, on constate un écart conséquent par rapport à 2012. Il y a dix ans, les absences était plus de deux fois (-56%) moins fréquentes pour la catégorie 35-44 ans et seulement de 10% moins fréquentes pour les travailleurs les plus âgés.

Similaire à l'Europe

La Suisse affiche un taux d'absentéisme au travail similaire à la moyenne observée parmi ses pays voisins membres de l'UE ou de l'AELE, selon les données publiées par Eurostat (l'organisme officiel de statistiques de l'Union européenne). Cette similitude s'explique en partie par des facteurs politiques. Des éléments tels que la durée des congés maternité ou les obligations liées au service militaire jouent un rôle déterminant dans l'absentéisme. À titre d'exemple, les pays nordiques, caractérisés par leurs politiques sociales développées, enregistrent des taux nettement supérieurs.

Cependant, en Suisse comme en Europe, la tendance est à la diminution du taux d'absentéisme, qui tend à retrouver son niveau pré-covid. L'onde de choc est passée.

Par Victor Poli et Basile Mermoud
Ce travail journalistique a été réalisé pour le cours « Publication, édition et valorisation numérique », dans le cadre du master en journalisme de l’Académie du journalisme et des médias (AJM) de l’Université de Neuchâtel.

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