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«Sur Twitter, je suis le propagandiste de Mediapart»

A 60 ans, Edwy Plenel est un inconditionnel de Twitter. Le président du site français d’information en ligne Mediapart utilise le réseau pour faire savoir. Tantôt lanceur d’alerte, tantôt outil de confrontation, notamment dans l’affaire Cahuzac.

Sur Twitter, Edwy Plenel est un crieur de journaux. Une promotion gratuite pour Mediapart, site d’information payant qui ne vit que de ses lecteurs. Né il y a cinq ans, le pure player enregistre aujourd’hui plus de 70 000 abonnements à 9 euros par mois. «Je n’ai pas besoin d’acheter trente secondes de radio ou de courtiser un éditorialiste pour qu’il nous mentionne», explique le président du site français. «Je fais savoir sur les réseaux sociaux qu’il se passe quelque chose sur notre site. Je suis le propagandiste de Mediapart. Et ça marche!»

Twitter, un tournant dans l’affaire Cahuzac

Pour les journalistes du site d’information, Twitter a pris toute son importance dans le cadre de l’affaire Cahuzac. Le 4 décembre 2012, Mediapart révèle que le ministre français du budget, Jérôme Cahuzac qui luttait en apparence contre la fraude fiscale, possédait lui-même un compte caché en Suisse.

La promotion de ce scoop a largement été opérée sur le réseau social, notamment par Fabrice Arfi, le journaliste qui a mené l’investigation. Twitter est donc logiquement devenu le théâtre d’un affrontement entre partisans et détracteurs de Mediapart. «Twitter a créé le buzz, il a créé l’alerte», indique Edwy Plenel. D’ailleurs, dès les premières révélations du site français, Jérôme Cahuzac contre-attaque sur le même terrain. «C’est par Twitter qu’il a répondu. Il a directement menacé tout le monde en affirmant qu’il poursuivrait en diffamation Mediapart et tous ceux qui reprendraient ces accusations. Il a donc utilisé Twitter pour bloquer l’information.» (Voir «Les grandes étapes de l’affaire Cahuzac sur Twitter» ci-dessous)

Plusieurs journalistes attaquent alors Mediapart via le réseau social, notamment Jean-Michel Aphatie, chroniqueur à RTL et Canal +. Mais pour Edwy Plenel, la distance était de mise. «J’ai répondu une ou deux fois lorsque ça allait trop loin, mais je ne considère pas avoir participé à un clash. Je crois qu’il ne faut pas rentrer là-dedans, surtout qu’en 140 signes, on ne peut pas véritablement argumenter, convaincre et expliquer.»

«Je suis encombré par mon nom et mon prénom»

Edwy Plenel

Sur le réseau social, la popularité du journaliste à la célèbre moustache ne cesse d’augmenter. Il est suivi par près de 180 000 personnes; un chiffre qui croît à chaque nouvelle affaire révélée par Mediapart.

Si le service de microblogging est aujourd’hui un outil indispensable à Edwy Plenel, le Français a d’abord été réticent: «J’utilisais surtout Facebook, un réseau sur lequel j’avais la possibilité de mettre plus de contenu. J’avais le sentiment qu’en 140 signes je ne pouvais pas le faire. Ce sont les jeunes de l’équipe de Mediapart qui m’ont montré que l’on pouvait utiliser Twitter comme un lanceur d’alerte. Pour moi, ce n’est pas un lieu de correspondances ou d’échanges.»

Ne jamais rien tweeter de personnel, c’est la règle qu’a choisi de suivre le journaliste de 60 ans. En quarante ans de carrière, Edwy Plenel a toujours su préserver sa vie privée, une intimité qu’il protège d’autant plus aujourd’hui, à l’heure d’Internet. «Pour moi, être présent sur les réseaux sociaux, c’est être présent dans une activité publique. Quand on est amené à agir dans l’espace public, il faut d’autant plus protéger son espace privé.» Une délimitation évidente pour le journaliste, puisqu’il n’est pas né avec ces réseaux et que ces derniers ont émergé au moment où sa notoriété était déjà établie.

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Le journaliste à la moustache confie sans détour que lorsque l’heure de la retraite sonnera, il s’éloignera certainement des réseaux sociaux. «Je dois vivre avec le fait que je ne suis pas Monsieur Dupond. Je suis encombré par mon nom et mon prénom. Peut-être que dans dix ans j’aurai un pseudonyme et un avatar. Et peut-être que je serai présent, mais que vous ne saurez pas que c’est moi!» Edwy Plenel, incognito? Pas exclu que la moustache y passe.

Les grandes étapes de l’affaire Cahuzac sur Twitter

Au premier jour des révélations de Mediapart, Jérôme Cahuzac dément les accusations dont il est la cible via le réseau social. Il ferme son compte Twitter le 12 avril 2013, soit dix jours après avoir avoué posséder de l’argent caché à l’étranger.

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Fiche Twitter d’Edwy Plenel

  • Nom: @edwyplenel
  • Description: journaliste, président et cofondateur de Mediapart
  • Nombre d’abonnés: environ 180 000
  • Nombre d’abonnements: 274
  • Nombre de tweets: plus de 5 000
  • Sur Twitter depuis: le 15 juin 2009
  • Signe particulier: tweets promotionnels, jamais personnels

Par Lea Jelmini et Romain Bardet
Atelier rédactionnel II, 2013

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