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La Suisse est douce avec l’industrie du sucre

epa03243480 A view of a large soda at a store in New York, New York, USA, 31 May 2012. New York City Mayor Michael Bloomberg announced plans yesterday to implement a ban on the sale of large sodas and other sugary drinks at restaurants, movie theaters and street carts. The law is another effort by the administration to fight obesity. EPA/JUSTIN LANE

Malgré les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé, la Suisse demeure indulgente avec le sucre. Dernièrement, la Confédération a tout de même passé un accord pour en réduire la dose dans les sodas.

Ce sont les boissons sucrées qui préoccupent actuellement la Confédération. Un rapport publié en 2021 avait révélé que les sodas sont à l’origine de près de 40% des sucres ajoutés de notre alimentation. En Suisse, la consommation de ces boissons concerne avant tout les personnes de 18 à 34 ans.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) sensibilise les consommateurs. L’institution indique qu’une canette de soda peut contenir jusqu’à 40 grammes de sucre. A titre de comparaison, cela représente environ 10 cuillères à café de sucre.

Une précieuse épice

Dans notre société, le sucre est source d’ambivalence. Sa consommation se situe quelque part entre revendication du droit au plaisir et devoir de rigueur. Historiquement, la denrée était considérée comme une épice chère et précieuse. Son industrialisation en a fait un ingrédient de première nécessité et un incontournable pour les transformateurs alimentaires.

Aujourd’hui, les pays d’Europe réagissent et mettent en place une série de mesures pour aider leur population à réduire sa consommation de sucre. 

En Suisse, les mesures mises en place sont relativement douces en comparaison avec les autres pays européens. La Confédération n'enregistre, pour l'heure, aucune loi ou règlement concernant le sucre. Les efforts de la Suisse se concentrent en priorité sur la prévention et l'élaboration de recommandations nutritionnelles. Une autre mesure encouragée par la Suisse est l'étiquetage.

Saviez-vous que ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de sucre dans la liste des ingrédients que le produit n’en contient pas ? Le sucre se cache derrière plusieurs mots : lactose, saccharose, sirop d’agave et de riz, caramel, miel, malt, concentré de jus de fruit…

C’est la déclaration nutritionnelle qui indique la somme de tous ces sucres. Ces étiquettes ne sont pas toujours bien visibles ni réellement intuitives. Alors, pour remédier à ce manque de clarté, certains pays européens ont, comme la Suisse, adopté des mesures d’étiquetage pour les produits sucrés. Ils imposent des labels ou des étiquettes d’avertissement clairement visibles comme des Nutri-Scores ou des feux tricolores. Ils espèrent ainsi guider les consommateurs lors de leurs achats.

Edulcorants

Les marques proposent des alternatives au sucre : les boissons "light" ou "zéro". Pour L'Illustré, c'est un piège. Plusieurs études ont montré que notre sens du goût confond édulcorants et aliments sucrés. Notre corps se prépare alors à recevoir des calories et libère de l’insuline. Boire un soda édulcoré entraîne une baisse de glycémie et nous donne envie de manger. La faim nous amène à consommer les calories économisées.

Coco-Cola propose une version "zéro sucre" de sa boisson. Crédit : Amélie Fasel

Le jus de fruit aussi, est souvent plus sain en apparence qu'en réalité. Même pressé à la main, il souvent trop sucré. L’Illustré explique : pour 1 dl de jus de pomme, il faut deux pommes. La boisson double la quantité de sucre et prive le corps des fibres du fruit. Elles sont pourtant précieuses pour la digestion et la régulation du taux de sucre. Dans le jus, le fruit a été travaillé et ses structures ont été détruites. 

Capri-Sun est une boisson à base d’eau, de sucre et de concentré de jus de fruits. Crédit : Amélie Fasel

La fédération romande des consommateurs recommande de boire peu de jus de fruit, et pas tous les jours. Pour que ce genre de recommandations se transforment en habitudes de consommation dans la population, une solution imaginée par les Etats est l’instauration d’une taxe sur les boissons sucrées.

Au micro de la RTS, Alain Berset justifie la position de la Confédération : "Ce n’est pas dans l’ADN politique de la Suisse". Nathalie Farpour-Lambert est médecin aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) et grande spécialiste de l’obésité et du surpoids. Elle voit les choses autrement : "Les recherches scientifiques au niveau mondial démontrent que les initiatives volontaires [de l’industrie] ne sont pas suffisantes".

Les taxes sont ce que l’industrie agro-alimentaire craint le plus.
N. Farpour Lambert

Certain pays européens ont fait le pas. La France, par exemple, "a décidé de taxer ses boissons sucrées il y a déjà plusieurs années avec un effet sur les achats de boissons sucrée" ajoute la médecin des HUG.

En Suisse, aucune taxe à l'horizon mais, le 11 décembre dernier, l’agence de presse suisse (ATS) à communiqué l’annonce d’un accord qui vise à diminuer le sucre dans les boissons dans la Confédération. L’Office fédérale de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) indique que "toutes les entreprises importantes sont prêtes à garantir une réduction du sucre de 10% d'ici fin 2024". La liste des sociétés qui s’engagent sera publiée au début de l’année 2023.

Par Margaux Lehmann et Amélie Fasel

Crédit photo mise en avant : KEYSTONE/ Rights Managed

Ce travail journalistique a été réalisé pour le cours “Publication, édition et valorisation numérique”, dans le cadre du master en journalisme de l’Académie du journalisme et des médias (AJM) de l’Université de Neuchâtel.

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