La modernisation de l’agriculture a bel et bien eu lieu. De plus en plus d’agriculteurs ont recours aux nouvelles technologies qui se réinventent constamment. Il tend à se demander si ces techniques innovantes convergent vers un monde davantage écologique.
» Mon téléphone me suit partout » explique David Jeanmaire, agriculteur à La Chaux-De-Fonds. Comme nombres d’agriculteurs, un outil est devenu indispensable pour son travail : son IPhone. Afin de suivre la traite de ses vaches, il utilise notamment une application qui lui permet même à distance de régler ses robots de traite.
Pour David Jeanmaire, cet outil lui permet surtout de gagner en productivité et en facilité. Mais ce dispositif numérique n’est évidemment pas le seul existant. D’autres techniques permettent aux agriculteurs de gagner du temps et de l’efficacité. Voici un petit aperçu :
- Drone : pour visualiser les troupeaux ou encore protéger les végétaux.
- Robots : robots de traite, robots pousse-fourrage, robots pour les champs.
- Capteurs : pour analyser l’alimentation des vaches.
- Systèmes de surveillance : pour contrôler la météo ou l’alimentation des vaches.
- Système GPS : pour les champs et les semences.
Bilan écologique mitigé
Alors que les mesures environnementales sont devenues l’affaire de tous, il semble intéressant de se demander si ces nouvelles technologies riment réellement avec » écologie » ? Pour certains spécialistes comme Benoît Biteau, agriculteur et député européen Groupe des Verts depuis 2019, ces nouvelles techniques permettent de réduire la dose de produits polluants (comme les pesticides par exemple). Cependant, le problème n’est pas la dose déversée, mais le produit en lui-même. Afin de répondre aux défis environnementaux, il faudrait supprimer l’utilisation de ces types de produits. Cet avis n’est pas univoque. Selon Jean-Luc Bonjour, agriculteur à Lignières, il n’y a aucun doute. L’agriculture numérique concorde parfaitement avec l’écologie.
Si ces techniques semblent écologiques car elles offrent davantage de précision dans les tâches agricoles, elles ne permettent pas de régler tous les problèmes existants, tels que la préservation de la biodiversité par exemple. Les explications de Jérémie Forney, professeur à l’Université de Neuchâtel:
Pour ce professeur, il est aussi important de réfléchir à la question de la durabilité et de l’impact de ces outils technologiques. Outre l’efficience qu’ils peuvent apporter, il faut également se pencher sur leur cycle de vie et leurs composants. Il serait peut-être nécessaire de comparer la longévité d’un tracteur ou celle d’un robot afin de voir leur durabilité. De plus, ces nouveaux appareils numériques contiennent des terres rares pour fonctionner qui sont souvent en situation de pénurie car ces métaux sont surexploités dans le monde.
Panorama suisse
Dans un souci écologique ou de productivité, davantage d’agriculteurs utilisent chaque année ces nouvelles techniques. A noter qu’il n’existe encore aucune statistique officielle selon l’Office fédérale de la statistique (OFS) puisque cette thématique est trop récente pour en tirer des conclusions. Une charte a tout de même été mise sur pied par la Confédération afin de promouvoir l’agriculture numérique en Suisse auprès des entreprises. Le Conseil fédéral souhaite développer ce secteur et offrir un accompagnement aux principaux intéressés.
Une étude suisse intitulée « Utilisation des technologies numériques dans l’agriculture suisse » de l’Agroscope a néanmoins été menée sur le sujet. Les auteurs remarquent que : » L’utilisation des technologies numériques suscite un intérêt croissant auprès du public, dans les exploitations agricoles et en politique « . Cette étude permet également de ressortir quelques caractéristiques de l’agriculture numérique en Suisse.
Solutions pour l’avenir
Si les avis divergent au niveau de l’impact environnemental de ces nouvelles techniques numériques agricoles, scientifiques et agriculteurs semblent s’accorder sur un point : les nouvelles technologies dans l’agriculture sont inhérentes au développement de ce secteur. Elles forment le quotidien des agriculteurs de demain:
» Je pense que l’agriculture numérique a beaucoup d’avenir. Je pourrais comparer cela au début de la mécanisation. Quand les premiers tracteurs sont arrivés, il semblait que c’était beaucoup trop coûteux et qu’on utiliserait toujours les chevaux pour travailler. En fin de compte, tout le monde a acheté des tracteurs, tout le monde a des robots de traite. Donc on va dans le sens de l’agriculture numérique vers le futur « .
Jean-Luc Bonjour, agriculteur à Lignières
Ce point de vue est partagé par Jérémie Forney: « Ce qui est certain c’est qu’en tout cas à moyen terme, la numérisation va continuer à se développer dans l’agriculture. Parce que pour l’instant mis à part la robotisation ou l’automatisation, on est dans des approches pionnières, on est dans l’expérimentation ». Le professeur à l’Université souligne que ces outils numériques vont se démocratiser pour prendre leur place dans l’agriculture conventionnelle, mais il rappelle que toutes les promesses qu’offrent ces techniques ne pourront sûrement pas être réalisées. D’autres modèles tendront à se développer dans le futur et concurrenceront les modèles d’aujourd’hui.
Par Margaux Deagostini
Crédit photo: Pixabay
Ce travail journalistique a été réalisé dans le cadre du Master en journalisme et communication (MAJ)