Sommes-nous maîtres ou tributaires de nos traces laissées sur Internet?

Notre trafic sur Internet déterminerait les contenus qui nous sont proposés, conformément à nos préférences et nos opinions. Pourtant, la capacité de l’internaute à croiser les sources pour ne pas se laisser enfermer dans ses certitudes est bien réelle. Un constat défendu par Bill Dutton, chercheur à l’Oxford Internet Institute.

Donald Trump a démontré combien l’usage massif des réseaux sociaux pouvait être un formidable moyen de contourner les médias traditionnels. En pariant sur les plateformes digitales, il est en effet parvenu à en faire une puissante caisse de résonance pour diffuser son message politique. Selon Donald Trump, cette stratégie s’est avérée payante: il est devenu le 45e président des États-Unis.

Vrai pour certains…

De nombreux spécialistes expliquent le succès de Donald Trump par les réseaux sociaux: selon ces experts, l’algorithme qui pilote Facebook ou Twitter exploite l’historique de recherche des internautes pour conditionner les résultats de leurs futures requêtes. Au point de les conforter dans leurs certitudes, et ce, indépendamment du niveau de véracité de l’information en circulation.

Résultat? Un sympathisant de Donald Trump, par exemple, a, par son comportement sur la toile et les traces qu’il y laisse, une forte probabilité de voir apparaître sur son fil d’actualité une majorité de contenus en phase avec ses sensibilités politiques. A l’inverse, les informations hostiles au milliardaire américain se retrouvent purgées du feed de ce même internaute.

Cette théorie de la répartition personnalisée de l’information répond au nom de « bulles filtrantes« , soit un algorithme qui devine quelle information un utilisateur souhaite voir, en fonction des traces laissées sur Internet (emplacement, historique de recherche).

… mais pas pour tous

Cette théorie des bulles filtrantes, Bill Dutton, chercheur de l’Internet Institute d’Oxford, s’est attelé à en démontrer les limites. Dans son étude publiée en 2017 et menée dans sept pays, il a interrogé puis examiné les pratiques de 14’000 internautes. Et il s’est avéré que ces derniers se donnent, et plus souvent qu’on ne le croit, les moyens de contourner ce que les médias sociaux tendent à leur livrer sur un plateau.

La clef pour y parvenir? Diversifier les types de sources, en interrogeant les moteurs de recherche et en consultant les sites de médias dits traditionnels.

A l’aune de ses conclusions, Bill Dutton estime que l’impact des réseaux sociaux, prétendu majeur sur l’opinion publique et les points de vue politiques, est en fait surestimé. Quant à la panique suscitée par la désinformation sur Internet et les médias sociaux, elle est, selon lui, exagérée.

Une hypothèse qui détonne. Elle sera étayée lors de la prise de parole du chercheur américain ce vendredi 5 avril, dans le cadre du Festival International du Journalisme de Perugia.

Infos pratiques

  • Les médias sociaux: préjugés et réalité. Que montre la recherche académique? (conférence en anglais)
  • Avec Bill Dutton (Oxford Internet Institute), animé par Philipp di Salvo (Institute of Media and Journalism – USI)
  • Vendredi 05/04/2019, 15:00-16:00 – Palazzo Sorbell, Perugia
  • Les autres informations sur le site web du Festival International du Journalisme

Crédits photo: Pixabay

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